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Nelly Rodi, directrice d’agence de style
Article mis en ligne le 1er décembre 2009
dernière modification le 23 mai 2023
Nelly Rodi : Créer, c’est prévoir
 
Mode, décoration, cosmétique, pour ne citer qu’eux, tous ces secteurs d’activités en perpétuel mouvement ont besoin d’anticiper les comportements et les goûts de leurs clientèles. C’est là qu’intervient l’agence de style Nelly Rodi basée à Paris. Sa fondatrice et directrice de création, Nelly Rodi, apporte son savoir-faire, entre autres clients du monde entier, au fabricant de fibres Toray et à l’entreprise de cosmétiques Shu Uemura.
 

Franc-Parler : Que recherchent vos clients, qu’est-ce qu’ils attendent comme services ?
Nelly Rodi : Nous avons deux types de services : soit des cahiers de tendances qui donnent les tendances futures. Avant-hier, j’ai présenté l’été 2011 aux industriels en termes de couleurs, de matières, commencements de formes, de silhouettes. Et le deuxième service, ce sont des contrats particuliers, spécifiques en fonction de chaque marque. Donc, les cahiers de tendances, les audiovisuels, les courriers tendances, ce sont les mêmes informations que nous donnons à tous types de clients tandis que le contrat particulier est bien sûr adapté entreprise par entreprise.
 
Franc-Parler : Ces cahiers de tendances, comment les faites-vous ?
Nelly Rodi : On a un processus de constitution qui dure à peu près six mois. C’est-à-dire qu’on fait d’abord des brainstormings avec des équipes, des stylistes, des gens de mode mais aussi des sociologues, des gens de marketing. Et on croise et après je décide en fonction des différents scénarii qui ont été créés dans ces brainstormings créatifs. Je décide quels sont ceux qui me paraissent les plus forts pour dans deux ans. À ce moment-là, on fait des photos pour réaliser, un peu comme des story-boards de films, des histoires et puis des photos des vêtements, des accessoires. Et puis on dessine et on fait des gammes de couleurs. Voilà, donc après, on constitue des cahiers de tendances. Il y a deux saisons par an. Par saison, nous avons une dizaine de books qui parlent, l’un de la couleur, l’autre des tissus, le troisième des impressions, le quatrième des formes prêt-à-porter féminin ou masculin ou de la cosmétique ou de la décoration intérieure.
 
Franc-Parler : Vous faites également des parfums, n’est-ce pas ?
Nelly Rodi : Oui, nous travaillons en amont. Alors, nous : mon fils Pierre-François Le Louët qui maintenant a pris la présidence de l’agence, a créé un parfum, parce que c’est un ancien de chez L’Oréal, et on a fait un parfum de niche à partir d’une idée de plusieurs parfums… Une espèce de piano à parfums que l’on peut mélanger pour personnaliser, faire son propre parfum. Mais bon, ce n’est pas notre business. On a fait ça plus pour démontrer à nos clients que les parfums de niche étaient intéressants quand ils étaient de qualité. Notre business, c’est beaucoup plus sur les tendances générales. Et on travaille pour des parfums, on a travaillé pour beaucoup de parfums mais en amont sur le concept.
 
Franc-Parler : La crise économique… Vous ressentez des effets dans les tendances ?
Nelly Rodi : Oh bien oui. Alors, dans les tendances, chez nos clients d’abord. Donc, automatiquement un peu partout. Bien sûr, c’est une crise extrêmement forte et mondiale. Enfin, personnellement, je pense que c’est un véritable changement de société, que c’est beaucoup plus qu’une crise simplement financière. Et dans les tendances, moi j’ai un petit signe d’espoir parce que les couleurs de l’été 2011, tout le monde, dans tous les scénarii, dans toutes les préparations, les gens avaient envie de fraîcheur, de naïveté, de couleurs beaucoup plus acidulées. Donc ça, ça peut prévisager un petit peu d’optimisme. Les couleurs sont toujours en accord avec l’atmosphère ambiante et on a eu énormément de grisés, de poussiéreux, de grisaille, de blanc d’ailleurs pour tourner la page. L’été dernier, c’était le blanc pur, net comme pour tourner une page. Là, on sent que pour l’été d’après, il va y avoir un retour à des vraies couleurs. Donc ça, ça peut, peut-être, être un signe de redémarrage.
 
Franc-Parler : À propos de couleur, pour votre logo, vous avez choisi l’argent. Alors…
Nelly Rodi : Le métal, l’aspect lunaire de l’argent par rapport à l’aspect gold, à l’aspect solaire parce que nous pensions qu’on était beaucoup plus dans des époques lunaires. Quand je dis lunaire, je veux dire que c’est moins flashy, c’est plus nocturne, c’est plus secret, c’est plus mystérieux. Voilà pourquoi l’argent. Avant, nous avions le vert, pas par hasard, parce que c’était un vert pomme dans un esprit de bio et on a changé, on a mis l’argent il y a 3 ans maintenant, quelque chose comme ça. On essaie d’y faire passer toujours des messages assez forts.
 
Franc-Parler : C’est une image un peu galvaudée : Paris, toujours capitale de la mode ?
Nelly Rodi : Ah oui. Personnellement, enfin Paris, capitale de la création au sens très large et pas que de la mode. Il y a une génération de designers extraordinaires en France qui contrebalancent bien le courant des créateurs. Je dirais même qui challengent les créateurs de mode. Oui, il y a aussi de nouveaux collectifs d’artistes. Il y a plein de choses qui se passent : le partage de la création, se mettre en groupe pour justement être encore meilleurs. C’est presque une colocation d’artistes. Oui, je trouve que Paris est quelque chose d’extrêmement fort et qui le reste pour le moment par rapport aux autres capitales.
 
Franc-Parler : Vous ne voyez pas de risque d’uniformisation dans les goûts et les tendances avec la globalisation ?
Nelly Rodi : Si, mais en même temps, il y a un tel besoin de customisation de la part du consommateur, d’utilisation de vintage, de remixer des tenues à l’ancienne, de reprendre une veste ancienne et de lui rebroder quelque chose par-dessus. Ce que font même des collectifs d‘artistes en ce moment, de nouveaux designers ou de nouveaux créateurs. Ce sont cela les voies de l’avenir, c’est de personnaliser au maximum le vêtement. Alors avec un fond qui peut être industriel mais après, il faut trouver les voies de personnalisation. Et justement de quitter l’uniformisation. Donc, toutes les grandes chaînes qui fabriquent en Chine ou ailleurs et qui font toutes, quand on se balade d’un magasin à l’autre, les mêmes produits… Personnellement, je suis pour le retour du mini-market par rapport aux super-grands magasins. Enfin, quand je dis le retour, c’est une nouvelle forme. On est en train de réinventer à la fois une forme de distribution, une forme de mode, de personnalisation.
 
Décembre 2009
Propos recueillis : Éric Priou
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